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Portraits de leader

Un chercheur appliqué

9 avril 2009

Josée Beaudoin

Étant jeune, François Coderre voulait tout faire, sauf de l'administration. Toutefois, les hasards de la vie l'y ont mené. Après être entré en administration, il s'est dit : «N'importe quoi, sauf le marketing.» Peu de temps après, il entreprenait sa maîtrise en marketing à l'Université de Sherbrooke. Aujourd'hui, à voir le plaisir qu'il prend à parler de ses recherches et de son métier, on peut affirmer que le professeur de marketing à la Faculté d'administration s'est tout sauf trompé de vocation. Par déformation professionnelle sans doute, ce spécialiste en gestion de la marque est très vigilant quant aux étiquettes que l'on serait tenté de lui coller. Voici donc le portrait d'un homme qui est beaucoup plus à l'aise avec l'étiquette d'entrepreneur qu'avec celle de leader.

En 1989, François Coderre était embauché comme professeur à mi-temps à l'Université de Sherbrooke et poursuivait parallèlement ses études doctorales à l'Université McGill. Deux semaines après avoir terminé son doctorat, on le nommait directeur du Département de marketing à Sherbrooke. Par la suite, il a été vice-doyen à la recherche et secrétaire de la Faculté durant quatre ans.

Depuis 2000, François Coderre est titulaire de la Chaire Bombardier de gestion de la marque, une chaire qui met de l'avant des projets de type académique et des projets de recherche faits en partenariat avec le milieu, dont l'organisme Aliments du Québec, le Conseil de la transformation agroalimentaire et des produits de consommation et le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec.

De la parole au geste

L'un des premiers mandats majeurs de la Chaire Bombardier de gestion de la marque est venu en 2003 de l'organisme Aliments du Québec, voué à la promotion des produits agroalimentaires québécois. À l'époque, la définition que l'organisme avait adoptée pour décider de ce qui était ou non un aliment du Québec stipulait que, si la matière première ne se trouvait pas ici en quantité suffisante, on n'en tenait pas compte dans le calcul. Ainsi, des produits tels que le café pouvaient très bien porter le logo Aliments du Québec.

La tâche des spécialistes de la chaire fut d'abord de revoir la définition puis d'effectuer maintes recherches et analyses afin d'établir une politique de marque pour l'usage du logo Aliments du Québec. De ce travail exhaustif est née, entre autres, la recommandation de créer un deuxième logo pour faire la nuance entre les aliments du Québec et les aliments préparés au Québec.

Ce premier projet avec Aliments du Québec a ouvert la voie à un partenariat bien vivant encore aujourd'hui. Boursière de la chaire Bombardier, Francine Rodier a consacré ses recherches doctorales à mesurer la valeur du logo Aliments du Québec pour les consommateurs. «Dans les sondages, les gens disent que c'est important pour eux d'acheter des produits du Québec, mais il y a souvent une différence entre le geste et la parole», explique François Coderre. Pour voir si la conviction se répercutait dans l'action, la doctorante a fait une rigoureuse étude en magasin pendant 39 semaines et observé l'évolution des ventes, selon que les produits portaient ou non le logo Aliments du Québec.

Les résultats dévoilés en conférence de presse le 1er avril révélaient que la présence du logo augmentait effectivement les parts de marché, une belle victoire pour l'organisme et la chaire, qui s'emploient depuis nombre d'années à afficher fièrement la distinction des produits de chez nous.

Découvrez l'indice

En 2004, le Conseil de l'industrie bioalimentaire de l'Estrie (CIBLE) venait rencontrer le titulaire de la chaire Bombardier en lui exposant la problématique suivante : les producteurs régionaux ont de plus en plus de difficulté à vendre leurs produits dans les grandes bannières. Afin d'évaluer les efforts consentis par les magasins d'alimentation pour promouvoir les produits régionaux, François Coderre et son équipe ont conçu l'indice CIBLE – Chaire Bombardier.

«Avec cet indice, on évalue les magasins selon cinq dimensions, c'est-à-dire l'offre en magasin, la qualité de l'aménagement, la publicité sur le lieu de vente, la publicité de masse et les politiques du magasin, explique-t-il. Par la suite, on fait un classement des magasins en fonction des efforts qu'ils déploient pour promouvoir les produits de leur propre région.»

À ce jour, à la demande de leurs tables de concertation respectives, sept grandes régions du Québec ont été évaluées par l'indice développé, ce qui représente au-delà de 300 magasins.

Contrairement à d'autres classements, les résultats demeurent confidentiels, de sorte que celui qui arrive bon dernier est le seul à le savoir. Toutefois, chaque table de concertation voit à ce que les trois grands gagnants récoltent leur part de félicitations et de visibilité, s'ils acceptent, bien sûr! L'un des objectifs de l'indice consiste à mettre en lumière les efforts particuliers déployés par certains magasins et à sensibiliser les autres aux pratiques gagnantes.

Professeure au Département de marketing, Caroline Boivin collabore étroitement aux recherches de François Coderre depuis huit ans maintenant et raconte avoir beaucoup appris à son contact, notamment pour ce qui est de structurer sa pensée. «Il a vraiment un très bon esprit de synthèse, il va au fond des choses et il est très méticuleux», dit-elle.

Lorsqu'on demande à Caroline Boivin ce qui fait la marque de commerce de François Coderre, elle répond exactement ce que le principal intéressé a identifié comme étant sa principale fierté professionnelle : «Ses recherches sont orientées vers le terrain. Oubliez la tour d'ivoire. Tout se développe de concert avec les gens du milieu de façon à ce que les résultats aient un réel impact», explique la chercheuse.

«J'ai adoré ce projet-là!»

Au nombre des fiertés de François Coderre s'inscrit aussi la création du programme de baccalauréat en communication-marketing lancé en septembre 2005, alors qu'il était directeur de son département.

Développée conjointement avec Armande Saint-Jean, directrice du Département des lettres et communications, cette formation unique au Québec offre un cheminement intégrant un baccalauréat en communication et une maîtrise en administration (option marketing) en seulement quatre ans. «C'est un programme que l'on a fait très rapidement. La collaboration avec le Département des lettres et communications était vraiment merveilleuse. J'ai adoré ce projet-là», dit-il.

En terminant…

Puisque ses recherches ont souvent ciblé les produits régionaux, François Coderre a sûrement un produit coup de cœur en cette matière. Toutefois, pour contourner son sens aigu de l'équité, il faudrait connaître ses meilleures adresses et aller faire de l'observation en magasin…

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